Д/М/Г
Pierres brutes, sol bétonné, portrait à l’huile, miroirs chinés… À l’enseigne de Marrow, coquet bistroquet campé au sud de la gare de l’Est, Arthur Combe (ex-Experimental) et Hugo Blanchet (ex-Robuchon) piratent les soifs errantes et les appétits égarés. Ce soir-là, les assiettes se faisaient virevoltantes : délicat poulpe encerclé par des nouilles kadaïf, crème d’aubergine brûlée, tahini noir et poudre d’estragon ; dingues trompettes-de-la-mort au sautoir, jus de cuisson corsé à la sauce soja, pistaches torréfiées, échalotes et cébettes ; régressive galette de riz croustillante, cèpes rôtis et mascarpone ; explosive poitrine de cochon confite, huître crue et en émulsion, cébettes, aneth et graines de courge ; avant un très sérieux brownie aux pistaches adouci d’une crème montée à la fève tonka, ou une pomme au four avec citron vert, noix de coco, aneth déshydraté et meringue saisie au fer, en détonant mariage brûlé-acide. // Eric Taylor
POUR LA SOIF ? Des vins à haute naturalité : rosé provençal du Domaine de la Mongestine (5 € le verre), pinot-noir alsacien du Domaine Agapé (40 € la bouteille), chardo bourguignon d’Athénaïs de Béru (46 €)… Mais aussi des cocktails, dont un mix cognac, Aperol, vermouth rouge, absinthe et bitter (13 €).
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https://www.lemonde.fr/m-gastronomie-le-lieu/article/2017/10/20/restaurant-stupeur-et-ravissement-au-marrow_5203893_4497598.html
Un restaurant, c’est parfois comme un ballon. L’attente est grande, l’impatience est là, l’appétit rapplique et monte très haut. Et puis, il arrive que tout tombe d’un coup. Le quartier n’est pas folichon (les abords de la gare de l’Est), il n’y a pas grand monde en début de service, la carte est hypercourte, la liste des vins, brève.
On plisse du nez avec l’impression de s’être royalement planté. On est encore dans un joyeux rétropédalage lorsque arrivent les entrées, servies dans des bols anodins. Surprise, c’est bon. C’est même très agréable. Les compositions jouent avec naturel, sans trop se pousser du col. C’en est même déconcertant, à l’image de ces poireaux charbon avec une vinaigrette aux agrumes, du lard de Colonnata et des herbes fraîches. Ce qui s’annonçait comme un pensum pensif devient un ravissement : un subtil ceviche de daurade royale ; un poulpe grillé exquis, avec du fenouil confit au curry à l’ancienne et du fromage blanc acidulé ; ou encore cette caille fumée et rôtie avec du brocoli à la râpe et de la vinaigrette tourbée.
Entre-temps, la salle s’est remplie. Et enfin, vous pigez que vous êtes au bon endroit : que des pointu(e) s, des enveloppés, des messieurs en conciliabules, aucun convive tombé là par inadvertance. C’est clair, l’adresse a du volume, avec du blason : le chef Hugo Blanchet est passé à l’Atelier Joël Robuchon et chez Darroze à Londres, et Arthur Combe, à la mixologie, est un ancien de l’Expérimental.
L’ambiance est simple, légère, la salle suffisamment dédoublée pour ne pas faire caisse de résonance. Dans ces cas-là, histoire de se pincer et de revenir au réel, il est d’usage de sonder les desserts. Régulièrement, les adresses s’essoufflent, délèguent à un commis, font l’impasse. Erreur, la rythmique est habilement gardée avec un délicieux brownie aux amandes, accompagné d’une crème fouettée à la vanille à se damner. Ce fut alors comme si le ballon avait regagné le ciel avec toute sa capacité et sa puissance. On tenait là une adorable bonne petite adresse. Honni soit qui mal y pensait.
Dommage : La musique est parfois un peu forte. Mais c’est juste pour chicaner.